Sencha vert-or de Morokozawa (Hon.yama)

Comme chacun le sais, les montagnes de Shizuoka regorgent de thés merveilleux et de producteurs passionnés. Hon.yama en particulier est une vraie "mine d'or".
Voilà une bien faible introduction pour présenter le sencha Kogane-midori, traduit simplement par "vert-or". Il suffit de voire les feuilles de ce thé vert japonais pour comprendre les raisons de ce nom. Il s'agit d'un cultivar original (je ne pense pas qu'il soit enregistré officiellement) isolé et développé par M. Satô à Morokozawa. Morokozawa et une localité de Ôkawa, zone assez reculée en amont de la rivière Warashina (et donc voisine de Ôma, d'où provient l'excellent sencha de M. Nakamura).

Cette belle couleur dorée des feuilles sèches se retrouve aussi dans la plantation. Ce cultivar fut isolé à partir d'une branche de Yabukita ayant par mutation naturelle poussé de cette resplendissante couleur. A partir d'une seule petite bouture, c'est 20 ans qu'il a fallu à M. Satô et à son père pour obtenir une plantation à même de fournir une quantité nécessaire pour pouvoir vendre ce thé. Bien sûr, la couleur des feuilles (c'est un phénomène rare mais pas unique, seulement, dans la plupart des cas, la bouture prise au départ, en grandissant fini par donner un arbuste vert) ne fut pas la seule motivation cette lourde tache, c'est aussi le constat que ces feuilles donnaient un thé très doux naturellement riche en umami (donc riche en saveur umami naturelle...).
Un phénomène intéressant est la façon dont ces rares variétés aux feuilles jaunes claires ou vertes très claires apparaissent. Ce Kogane-midori, contrairement à ce que pourrait laisser penser ses saveurs douces, est cultivé absolument sans ombrage. En effet, l'ombrage lui fait perdre sa couleur caractéristique. En revanche, si l'on prend le Hoshino-midori de Yame (le fameux "thé blanc" que j'avais évoqué il y a plusieurs années lorsque je travaillais chez MYE) on à le phénomène inverse, où les théiers ont besoin d'ombrage pour rester blanc).

Enfin, j'ajouterais que Satô-san travaille sans pesticide et quasiment sans engrais.
Pas d'ombrage, peu d'engrais, l'umami, la douceur de ce sencha est tout à fait différente de celle de gyokuro ou de certains sencha trop boostés à l'azote.

Les feuilles sèches ne dégagent qu'un parfum très léger (un séchage final "hi-ire" très faible n'y est pas pour rien), mais doux et chaleureux.

Admettons que les recommandations d'infusion faites par le producteur soient la meilleure solution pour profiter des caractéristiques de ce thé. 3g pour 30ml d'eau glacée. 5min. Opération qui peut être répétée un nombre important de fois pour une liqueur forte, douce, mais néanmoins sans lourdeur et fine.

Néanmoins, n'étant personnellement pas un fanatique absolument des infusions à froid, je prépaerais autrement.
5g pour 60ml d'eau à 50°C environ pendant 90s.



Le resultat est une liqueur au parfum vert et frais, sucré et léger.
La permière attaque en bouche est puissance. Avec beaucoup de volume, on a de la douceur, de l'umami, contrebalancé par une pointe d'astringence.
Puis s'installent en bouche des arômes frais et vert, pas herbeux, légèrement sucrés. Cette douce fraicheur trouve de magnifiques écho dans la gorge.
Malgré la force des saveurs, ce thé est velouté, aérien, est le fort umami n'a rien de gênant, rien d'artificiel. 
Nous sommes en face d'un excellent thé de montagne, très fin, élégant même. 

En augmentant la température à chaque fois, on obtient quatre belles infusions, toutes dominées par cette délicieuse et douce fraîcheur, alors que l'astringence augmente doucement.  Mais toujours, la liqueur reste très propre, aucun accroc ni en bouche, ni en gorge, pas d'amertume.

Alors, en s’éloignant encore plus de l'idée de faire ressortir absolument la douceur qui caractérise ce Kogane-midori, pourquoi ne pas passer à une préparation classique ?
4g de feuilles, 70ml d'eau à  70°C, 60s.
Le résultat est encore très intéressant, très bon. La liqueur est maintenant plus stimulante. La douceur est bien là, avec plus d'astringence, plus de relief encore. Ces saveurs vertes et fraîches restent en toile de fond, tout à fait délectables. Malgré le caractère plus vivifiant que prend ainsi la liqueur, celle-ci reste encore veloutée, un vrai plaisir qui coule avec fluidité en gorge.
Ainsi ce sencha se confirme pour moi comme un grand thé de montagne, au travail très soigné, qui pourrait probablement donner encore plus avec une torréfaction (hi-ire) laissée au soins d'un grossiste expérimenté (en principe, ce n'est pas la producteur qui effectue cette phase très importante). Finalement, la couleur des feuilles passe au second plan derrière la qualité même des feuilles et du produit fini.

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