Thé et nouvel an au Japon
Bonne année 2010 à toutes et à tous.
En espérant comme tout le monde que cette année du Tigre sera celle d'une relance durable de l'économie mondiale, espérons aussi à notre échelle que ce sera une grande année pour le thé japonais, comme le fut 2008, à la différence de 2009, où les théiers eurent à subir un brusque retour du froid en février.
Pour commencer cette année donc, je vais parler d'une "tradition" du nouvel an au Japon, qui se rapporte évidement au thé. Je mets tradition entre guillemets, car si la tradition de boire (de l'alcool) dès le matin du 1er janvier semble fort suivie par les japonais (qui n'en manquent pas une pour se mettre un coup dans le pif...), celle de boire le ôbuku-cha 大福茶 semble l'être beaucoup moins. Pour vous dire, les parents de ma femme n'en n'avaient jamais bu de leur vie ! Il faut dire qu'il semblerait que cette coutume soit plus présente dans le Kansai... admettons.
Le ôbuku-cha, ou fuku-cha, est un thé que l'on boit au Japon le jour du nouvel an pour s'assurer une année prospère, sans maladie et pleine de bonne fortune. C'est un thé de bon augure.
Il s'agit en fait aujourd'hui d'un sencha de basse qualité auquel est mélanger du genmai (riz grillé), de la prune saumurée (umeboshi), du konbu (sorte d'algue) des haricots de soja, du marron et du sanshô (épice chinoise). Le tout est infusé à l'eau bouillante, donnant quelque chose de finalement bien proche du genmai-cha avec l'acidité de la prune saumurée.
Son origine remonte dit-on à l'an 951, alors qu'une terrible épidémie de maladie intestinale (ce type de maladie est toujours terrible) décime la population de Heian-kyô (actuelle Kyôto). L'empereur Murakami (村上天皇) ordonna à Kôya 空也(903 - 972) , supérieur du monastère Rokuharamitsu-ji (六波羅蜜寺), des prières pour chasser les éléments néfastes responsables de ce désastre. Malheureusement, cette mesure resta sans effet.
Le vénérable moine parcouru alors la ville avec une charrette sur laquelle il fixa une statue du bodhisattva Kannon (sk. Avalokitesvara, ch. Guanyin) aux Onze Visages (jûichi-men kannon 十一面観音) et chargée de thé. En plus de prières, il fit boire à la population du thé auquel il ajouta de la prune saumurée séchée. Très vite, l'épidémie prit fin.
Ravi de ce miracle, l'empereur Murakami décida de boire un tel thé chaque premier de l'an pour assurer au pays une année faste. Ce thé est appelé "thé but par l'empereur" (ôbuku-cha 皇服茶) ou "thé but par le roi" (ôbuku-cha 王服茶). Par déformation du sens, avec le même prononciation mais des caractères différents, on a généralement aujourd'hui ôbuku-cha, "thé de la grande bonne fortune" 大福茶.
Aussi, il est intéressant, qu'au Japon comme ailleurs, un type proche de thé (avec de la prune et/ou des haricots) est bu comme geste de bon augure aux moments spirituellement agités des changements de saison.
Enfin pour en finir sur le thé japonais au moments des fêtes de fin d'année (o-seibo お歳暮) et du nouvel (o-nenga お年賀), il faut savoir que le thé est quelque chose qui s'offre (malheureusement surtout par les personnes d'un certain âge). Aussi, à cette époque, tous les marchands de thé sortent leur ôbukucha, bien sûr, mais aussi un sencha dans lequel se trouve des petits morceaux de feuilles d'or. C'est un peu kitch, mais les japonais apprécient cela. D'une manière générale l'esthétique nouvel an au Japon est un peu kitch de toute façon.
Encore une fois bonne année ! bonne santé ! à vos gri-gris.
bonjour,
RépondreSupprimerEt où peut-on trouver ce thé de fête à Paris ?
Ou sur le net.
ça a l'air très bien.
bonne année !
Virgile
Bonjour Virgile,
RépondreSupprimerJe ne sais pas trop où trouver ce thé en France, d'autant plus qu'à l'heure qu'il est, même au Japon on n'en trouve plus...passé le nouvel an.
Ceci dit, ce n'est pas franchement bon, et à peu de chose près, c'est un genmai-cha avec un peu de l'acidité de la prune saumurée.
ah ok, merci !
RépondreSupprimerPlutôt que des boutiques de thé, peut être que tu pourrais voir à l'épicerie japonaise à Opéra, dont j'ai oublié le nom....
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