L’époque d’Edo, changements et apparition du sencha
L’époque d’Edo (1603-1868), ou époque moderne, voit un Japon enfin unifié et pacifié après les longues luttes du moyen-âge. Durant cette période de domination des Tokugawa, la classe des guerriers, dont la prise de pouvoir au détriment de l’Empereur marqua le début de l’époque de Kamakura, devient dans cette société pacifiée une sorte de nouvelle noblesse. Et bien sûr, la cérémonie du thé reste leur apanage dans une forme figée. Mais la société connaît de profonds changements, les marchands citadins et intellectuels gagnent en aisance et prennent une importance grandissante, notamment à Edo, la nouvelle capitale, future Tôkyô.
Dans ces conditions, les lettrés se tournent dès le 17ème siècle vers un thé différent, marquant ainsi un rejet du caractère figé et rigide de la cérémonie du thé. Il s’agit d’un thé, encore une fois venu de Chine, que l’on nomme à l’époque tô-cha 唐茶, et qui correspond à ce que l’on appelle aujourd’hui kama-iri-cha 釜炒り茶. C’est ce thé vert apparu en Chine durant les Ming, dont l’oxydation des feuilles est stoppée par chauffage dans une grande poêle. Les feuilles sont ensuite malaxées et roulées, séchées, puis enfin dégustées en infusions. Le moine Ingen 隠元 (1592-1673) rapporta de Chine les instruments pour préparer ce thé, instruments probablement proche de ceux utilisés pour le gong fu cha 工夫茶 (méthode de préparation du thé en Chine diffusée à partir de la province du Fujian). On sait que Kôyûgai 高遊外 (1675-1763), aussi connu sous le nom de Baisaô 売茶翁 (le vieillard vendeur de thé), a parcouru le pays en faisant déguster du thé à ceux qui croisaient sont chemin. Grâce à ses poèmes, il apparaît qu’il utilisait une théière de type cha hu 茶壷, identique à celles utilisées en Chine à la même époque.
Les lettrés furent attirés également par le fait que le thé obtenu à une liqueur translucide, à la différence du matcha opaque.
Un thé avec une belle liqueur translucide été donc semble-t-il ce qui été recherché à cette époque. Ainsi, en 1738, en alliant les qualités des méthodes de fabrication du matcha et du kama-iri-cha, un producteur de Uji (Kyôto), Nagatani Sôen 永谷宗円 créa ce qui est aujourd’hui le sencha 煎茶 ! Les feuilles fraîchement cueillies sont chauffées à la vapeur pour stoppé l’oxydation, puis sont séchées en étant longuement malaxées et roulées à la chaleur. Le thé est ensuite infusé dans une théière. Il présenta au célèbre marchand de Nihonbashi à Edo, Yamamoto-ya 山本屋 (actuel Yamamoto-yama 山本山) son thé, qui reçu un accueil enthousiaste. Peu à peu, la production de ce sencha se répandit dans tout le Japon. Néanmoins, le kama-iri-cha continu à dominer.
Aussi, en 1835, apparaît le gyokuro 玉露. Sa fabrication ne diffèrent guère du sencha, à la différence que comme pour le matcha, les théiers sont couverts pendant plusieurs jours avant la cueillette. On attribue son invention à Yamamoto Kahee 山本嘉兵衛 6ème du nom, mais il existe cependant d’autres versions. Fabriqué avec du thé de Kyôto, c’est clairement un produit de luxe.
Il convient aussi de préciser que la culture couverte des théiers n'est alors autorisées qu'à Kyôto (Uji).
Enfin, durant l'époque d'Edo, tous ces nouveaux thés, sencha, gyokuro, tô-cha, restent tout comme le matcha des produits réservés à une minorité de citadins fortunés. Une liste de prix de chez Yamamoto-yama de la fin de l'époque d'Edo montre des matcha à des prix incroyables, seulement accessibles aux plus nantis, et, même les sencha restent très chers. On peut penser que ces produits étaient destinés aux restaurants de luxe qui voient le jour au milieu de l'époque d'Edo, justement au moment de l'apparition du sencha.
Le reste de la population, dans les campagnes en particulier, continue de consommer des ban-cha 番茶, thés d'une grande diversité, très simples. Ce qui apparaît être le plus répandu dans tout le pays, est un bancha de type "kama-iri", on coupe le théier dans quasi totalité, pour en prendre toutes les feuilles, on stoppe l'oxydation par chauffage direct dans une grande poêle ou marmite en fer, puis on malaxe très largement les feuilles sur une natte. Lorsqu'elles deviennent collante, juteuses, on les refait chauffer, puis on les re-malaxe, les re-chauffe, et ainsi de suite jusqu'à ce qu'elles soient complètement sèches. Le thé obtenu ainsi est consommé bouillie dans une grande bouilloire. On le prépare le matin, laissant la bouilloire toute le journée sur le feu, quand il n'y a plus de thé, on rajoute de l'eau bouillante sur les mêmes feuilles. (le malaxage étant très grossiers, les cellules des feuilles sont peu abimées, ainsi, le thé infuse très peu et très lentement).
Il s'agit d'une manière générale d'un thé produit pour la consommation du foyer. Néanmoins, ce type de production fut encouragé, en tant que source de revenus supplémentaires. Cela laisse penser qu'il était également vendu dans les villes, en tant que thé de "monsieur tout le monde".
Aussi, ces types de thé étaient bruns, donnant une liqueur elle aussi brune, et il ne fait aucun doute que Nagatani Sôen, avec son sencha, eu la volonté de créer un thé japonais vert, comme le matcha de Kyôto. Un thé qui serait de plus possible de produire dans tout le pays.
Vers la fin de l’époque d’Edo, l’arrivée de Perry, suivie l’année suivante de l’ouverture du Japon en 1854, marqua un tournant décisif dans l’histoire du Japon, mais aussi dans celle du thé japonais.
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Dans ces conditions, les lettrés se tournent dès le 17ème siècle vers un thé différent, marquant ainsi un rejet du caractère figé et rigide de la cérémonie du thé. Il s’agit d’un thé, encore une fois venu de Chine, que l’on nomme à l’époque tô-cha 唐茶, et qui correspond à ce que l’on appelle aujourd’hui kama-iri-cha 釜炒り茶. C’est ce thé vert apparu en Chine durant les Ming, dont l’oxydation des feuilles est stoppée par chauffage dans une grande poêle. Les feuilles sont ensuite malaxées et roulées, séchées, puis enfin dégustées en infusions. Le moine Ingen 隠元 (1592-1673) rapporta de Chine les instruments pour préparer ce thé, instruments probablement proche de ceux utilisés pour le gong fu cha 工夫茶 (méthode de préparation du thé en Chine diffusée à partir de la province du Fujian). On sait que Kôyûgai 高遊外 (1675-1763), aussi connu sous le nom de Baisaô 売茶翁 (le vieillard vendeur de thé), a parcouru le pays en faisant déguster du thé à ceux qui croisaient sont chemin. Grâce à ses poèmes, il apparaît qu’il utilisait une théière de type cha hu 茶壷, identique à celles utilisées en Chine à la même époque.
Les lettrés furent attirés également par le fait que le thé obtenu à une liqueur translucide, à la différence du matcha opaque.
Un thé avec une belle liqueur translucide été donc semble-t-il ce qui été recherché à cette époque. Ainsi, en 1738, en alliant les qualités des méthodes de fabrication du matcha et du kama-iri-cha, un producteur de Uji (Kyôto), Nagatani Sôen 永谷宗円 créa ce qui est aujourd’hui le sencha 煎茶 ! Les feuilles fraîchement cueillies sont chauffées à la vapeur pour stoppé l’oxydation, puis sont séchées en étant longuement malaxées et roulées à la chaleur. Le thé est ensuite infusé dans une théière. Il présenta au célèbre marchand de Nihonbashi à Edo, Yamamoto-ya 山本屋 (actuel Yamamoto-yama 山本山) son thé, qui reçu un accueil enthousiaste. Peu à peu, la production de ce sencha se répandit dans tout le Japon. Néanmoins, le kama-iri-cha continu à dominer.
Aussi, en 1835, apparaît le gyokuro 玉露. Sa fabrication ne diffèrent guère du sencha, à la différence que comme pour le matcha, les théiers sont couverts pendant plusieurs jours avant la cueillette. On attribue son invention à Yamamoto Kahee 山本嘉兵衛 6ème du nom, mais il existe cependant d’autres versions. Fabriqué avec du thé de Kyôto, c’est clairement un produit de luxe.
Il convient aussi de préciser que la culture couverte des théiers n'est alors autorisées qu'à Kyôto (Uji).
Enfin, durant l'époque d'Edo, tous ces nouveaux thés, sencha, gyokuro, tô-cha, restent tout comme le matcha des produits réservés à une minorité de citadins fortunés. Une liste de prix de chez Yamamoto-yama de la fin de l'époque d'Edo montre des matcha à des prix incroyables, seulement accessibles aux plus nantis, et, même les sencha restent très chers. On peut penser que ces produits étaient destinés aux restaurants de luxe qui voient le jour au milieu de l'époque d'Edo, justement au moment de l'apparition du sencha.
Le reste de la population, dans les campagnes en particulier, continue de consommer des ban-cha 番茶, thés d'une grande diversité, très simples. Ce qui apparaît être le plus répandu dans tout le pays, est un bancha de type "kama-iri", on coupe le théier dans quasi totalité, pour en prendre toutes les feuilles, on stoppe l'oxydation par chauffage direct dans une grande poêle ou marmite en fer, puis on malaxe très largement les feuilles sur une natte. Lorsqu'elles deviennent collante, juteuses, on les refait chauffer, puis on les re-malaxe, les re-chauffe, et ainsi de suite jusqu'à ce qu'elles soient complètement sèches. Le thé obtenu ainsi est consommé bouillie dans une grande bouilloire. On le prépare le matin, laissant la bouilloire toute le journée sur le feu, quand il n'y a plus de thé, on rajoute de l'eau bouillante sur les mêmes feuilles. (le malaxage étant très grossiers, les cellules des feuilles sont peu abimées, ainsi, le thé infuse très peu et très lentement).
Il s'agit d'une manière générale d'un thé produit pour la consommation du foyer. Néanmoins, ce type de production fut encouragé, en tant que source de revenus supplémentaires. Cela laisse penser qu'il était également vendu dans les villes, en tant que thé de "monsieur tout le monde".
Aussi, ces types de thé étaient bruns, donnant une liqueur elle aussi brune, et il ne fait aucun doute que Nagatani Sôen, avec son sencha, eu la volonté de créer un thé japonais vert, comme le matcha de Kyôto. Un thé qui serait de plus possible de produire dans tout le pays.
Vers la fin de l’époque d’Edo, l’arrivée de Perry, suivie l’année suivante de l’ouverture du Japon en 1854, marqua un tournant décisif dans l’histoire du Japon, mais aussi dans celle du thé japonais.
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