Oolong de Sashima ... et de Taiwan

Pour la deuxième année consécutive, je propose le thé oolong de Sashima cultivar Qingxin-wulong de M. Kimura, ainsi qu'un deuxième cette année, fait avec le cultivar Kanaya-midori. Ce producteur travaille non seulement avec un cultivar taïwanais (Qingxin-wulong donc) mais aussi avec des machines taïwanaises, pour des oolong se rapprochant dans le style des baozhong. 

Voilà une occasion intéressante de faire de rapides comparaison avec des Baozhong taïwanais provenant de chez Stéphane de Tea Masters (et Tea Masters Blog), dont la sélection est sûre et variée (ici au Japon il est facile de trouver divers Dong ding ou oolong de haute montagne, mais les sélections des boutiques en terme de baozhong ne dépassent rarement deux références, dommage).


La comparaison entre deux Qingxin-wulong de manufacture relativement proche mais de régions pour le moins éloignées, Wenshan à Taïwan et Sashima au nord de Tokyô au Japon, ne peut qu'aiguiser les curiosités. Bien sûr Wenshan est en quelque sorte le berceau du baozhong, alors qu'on ne produit sérieusement des oolong au Japon que depuis quelques années, et que cela est le fruit d'une poignée de producteurs.

 Du pur point de vue des arômes, les deux thés appartiennent clairement au même domaine, les deux proposent, de manière un peu différente certes, les mêmes arômes floraux, sucrés comme des bonbons aux fleurs, avec une impression proche de la lavande, arômes caractéristiques de cet antique cultivar taïwanais. Il est intéressant par ailleurs de voir comme Qingxin-wulong apparaît souvent comme LE cultivar représentatif des oolong taïwanais, un peu comme Yabukita pour les sencha au Japon, alors qu'il possède finalement des arômes vraiment uniques et typiques.

 Pourtant au niveau des sensations ces deux thés se distinguent bien. D'abord, celui de Wenshan est bien plus robuste en bouche. Il me semble aussi plus végétal en quelque sorte. Bien que tout aussi aromatique, celui de Sashima me semble moins pêchu, mais aussi plus rond. J'irais presque jusqu'à dire qu'il est plus facile d'accès si se n'était la première infusion que j'ai toujours du mal à bien saisir, elle me semble toujours manquer d'harmonie, alors que les infusions suivantes se passent si bien pourtant. Malgré son attaque plus puissante, il me semble que tout est tout de suite bien à sa place dans le Wenshan. 

En bref, voilà une dégustation des plus stimulantes et intéressante.


Voici ensuite, nouveau cette année, le oolong Kanaya-midori. Celui-ci est très fluide, propre, velouté. En fait, parmi les nombreux oolong de M. Kimura dont j'ai eu des échantillons cette année, plus que le Qingxin-wulong même, c'est celui qui m'a le plus charmé. 

 Tant au nez que sur le palais, c'est particulièrement fruité, de la pêche, de l'abricot, de mangue même. On y trouve aussi de subtiles notes florales, mais surtout une sensation générale lactée, bien évidemment caractéristique de Kanaya-midori. Cela évoque bien sûr aussi, de loin, le cultivar taïwanais Jinxuan, mais celui-ci n'était pas parmi les thés que j'ai commandé cette fois à Stéphane.  En revanche, il y avait le TTES#22 (Qin Yu), cultivar tout nouveau, croisement Jinxuan x Qingxin-wulong (du beau monde), provenant de San Hsia.

Il ne s'agit pas là de faire un comparatif. Ce Qin Yu est vraiment très élégant, les arômes évoquent des fleurs douces agrémentées d'épices subtiles et sucrées comme de la vanille. Mais sur toute la dégustation, il y a cette sensation veloutée en enveloppante, peut être ici moins lactée que crémeuse. C'est un baozhong très aromatique, ce Qin Yu me semble plus fin qu'un Jinxuan, plus sage qu'un Qingxin (impression qui vaut ce qu'elle vaut, n'ayant pas une expérience débordante dans ce domaine). 

 

Je veux finir en évoquant un autre baozhong de Wenshan qui m'a particulièrement plut, un cultivar Jin Guan Yin, rare à Taïwan puisqu'il n'y en a qu'une seule plantation à Wenshan selon Stéphane. Je connaissais cette variété par un très bon thé noir Wu Yi. Très floral, mais avec de fortes notes de citron, citron vert, de menthe même, voilà un baozhong à la fois riche et très rafraîchissant que j'ai tout particulièrement apprécié. 

 En poussant le bouchon très loin, et juste pour finir bon gré mal gré dans cette mise en parallèle où le Japon fait figure de "new world", je reviens rapidement non pas sur un oolong de Sashima, mais de Hon.yama, le Izumi de M. Takahashi (qui utilise aussi par ailleurs deux cultivars de taïwanais qu'il ne m'est pas permet de nommer). Complètement différent dans les sensation, je le cite juste pour ses arômes d'agrume, ici plus sucrés fruités, la dominante n'est pas florale du tout. Rappelons seulement que le Izumi, au même titre que le phénoménal Kôju (et ses arômes de raisin blanc) sont cultivés en plantation shizen-shitate (théiers non taillés que l'on coupe à 20-30 cm du sol après la récolte de printemps et qu'on laisse ainsi repousser quasi-librement jusqu'au printemps suivant), méthode typiquement japonaise qui produit peu de feuilles, mais très riches, avec beaucoup de théanine. Cela donne d'emblée un caractère assez différent.

Voilà pour cet article un peu différent (en dehors de ma zone de confort), faisant un lien entre deux mondes du thé qui semblent parfois si éloignés, mais pourtant si proches, tant du point de vue de l'histoire, que des nombreuses connections contemporaines entre les professionnels du thé.

 


Commentaires

Articles les plus consultés