Thé noir de Kumamoto, Benifûki
Au
printemps dernier, le département de Kumamoto fut frappé par une
série de violents tremblements de terre, causant beaucoup de dégâts.
Ashikita, au sud du département, fut épagné de dégâts
importants, ainsi, les plantations de M. Kajihara n'ont pas souffert
cette fois-ci (l'an dernier, un glissement de terrain avait
partiellement endommagé sa plantation « zairai »).
Cela
fait plusieurs années que je propose ses kama-iri cha, mais voici
« enfin » cette année un de ses thés noirs. Je dis
« enfin » parce que j'avais était agréablement surpris
par un de ses thés noirs qu'il m'avait servi il y deux ans, mais à
l'époque je n'avais pas la tête à cela. Puis l'an dernier, j'ai pu
boire un certain nombre de ses thés noirs 2015 qui m'ont confirmé
son talent. Kajihara-san se rend régulièrement à Taiwan, et reçoit
aussi regulièrement un spécialiste taiwanais qui peut le conseiller
dans la tâche encore peu maîtrisée de la fabrication du thé noir
au Japon.
Les
feuilles sont magnifiques. Le travail rappelle en effet celui de
certains thés noirs taiwanais, de longues feuilles noires torsadées,
épaisses, on peut les attraper une par une avec les doigts, et
portée sous le nez, une seule de ces feuilles est déjà parfumée.
Sucré, fruité, épicé, le parfum des feuilles sèches est un
plaisir qui justifierait presque en lui-même l’existence de ce thé
noir japonais.
Avec
4g de feuilles, 150ml d'eau, on peut laisser infuser 2 bonnes
minutes.
L'infusion
est elle aussi très sucrée et fruitée. Un peu de fruits confits,
de l'abricot, une fraîcheur mentholée subtile, de très légères
notes de cuir. Globalement, ce thé offre un parfum très gourmand.
En
bouche on ressent juste ce qu'il faut d'astringence. Malgré des
arômes très doux, la liqueur coule très bien dans la gorge.
L'after est très riche, c'est là que s'exprime une foule d'arômes
là encore très gourmands, fruités, sucré, s'équilibre avec un
reste d'astringence qui, absolument pas tannique ni râpeux, donne
beaucoup de relief et de force. On peut encore percevoir l'impression
mentholée, pas si commune avec les thés noirs japonais.
Avec
une bonne présence d'astringence très élégante, des arômes
sucrés évidents, ses tonalités discrètes de cuir, d'épices, on
voit une bonne utilisation des caractéristique de Benifûki, qui se
montre encore une fois comme un excellent cultivar pour le thé noir
japonais.
Ce
thé de M. Kajihara m'a enthousiasmé par la force des ses arômes
doux et fruités, qui ne sont pas inédits, pourtant, bien souvent,
lorsque ce type d'arômes sont très présent, on a des thés noirs
lourds et pataud, écœurant, manquant de fluidité. Or, ici ce n'est
pas du tout le cas. L'équilibre est bien trouvé, le thé se boirait
à grandes gorgées, une fois commencer, difficile de s'arrêter.
Aussi,
pour avoir bu l'hiver dernier le millésime 2015, je comprends que
c'est un thé au potentiel important. Il va beaucoup évoluer dans
les mois à venir, s'affirmer, prendre de la richesse. C'est l'un de
mes grands coup de cœur de ces derniers temps. J'aurais voulu
proposer le 2015, mais ce thé étant très demandé, l'hiver
dernier, il était évidemment trop tard. J'ai du me montrer patient
et attendre le millésime 2016, excellent mais encore jeune, plein de
promesses.
Bonjour Patrick
RépondreSupprimerOui, en effet, jusqu'à une période relativement récente (et de la même manière qu'au Japon) le thé produit à Taiwan étant essentiellement destiné à l'exportation il était nécessaire de s'adapter à l'ère du temps. L'industrie du thé s'y beaucoup développée sous l'impulsion de l'occupant (machines, cultivars, etc) japonais, mais il est surtout intéressant de voir que le thé noir Taiwanais s'est ensuite développé dans le bon sens alors que le thé noir japonais (produit dès l'ère Meiji) n'a jamais trouvé le succès. Aujourd'hui, devant la chute continuelle des ventes de thé vert ici, beaucoup se lancent dans le thé noir, mais dans l'ensemble, la production reste très médiocre, étant malheureusement souvent le fait de producteurs faisant cela pas défaut, et n'ayant eux-même jamais bu de thé noir, ils ont peu de chance de faire quelque chose de bon, n'ayant aucune référence. La plupart des producteurs faisant de bonnes choses ont une bonne connaissance des thés chinois et indiens. Avoir un référent est essentiel, après les techniques de production peuvent s'étudier dans les centres de recherche.
Par ailleurs, on trouve parfois chez les producteurs voulant faire des thés noirs ou Wulong de vieilles machines d'occas qu'ils ont faire venir de Taiwan ou de Chine, et il est amusant de voir que ces machines furent fabriquées avant guerre au Japon.
Merci pour l'article! J'apprend beaucoup en te lisant! Bonne journée !
RépondreSupprimer