Matcha de Uji-Shirakawa
Après
deux très beaux gyokuro de Uji-Shirakawa, je reste dans cette zone de
production avec trois matcha, tous issus de tencha produits par le
même producteur, Tsuji Kiyoharu.
En
fait, traditionnellement, Shirakawa à Uji est avant toute chose une
zone de production de gyokuro très réputée. Son image n'est
absolument pas associée au tencha (le tencha est le matériau brut
qui sera moulu en matcha), et la famille de Tsuji-san était
productrice de gyokuro. C'est lui qui par gout, intérêt, par
passion donc, se lança dans la production de tencha haut de gamme,
abandonnant complètement le gyokuro, et ce avec grand succès
puisqu'il jouit aujourd'hui d'une grande reconnaissance, ayant obtenu
plusieurs fois entre autre le prix du ministre de l'agriculture aux
concours nationaux.
Je
profite de cette suite d'articles concernant gyokuro et matcha, pour
corriger une erreur qui continue à trainer sur les sites, et peut
être même sur les lèvres, de nombre de vendeurs à l'étranger. Non,
le matcha n'est pas du gyokuro réduit en poudre. Le matcha est
obtenu en réduisant en poudre ce que l'on appelle ''tencha''. Certes
tencha et gyokuro (les vrais en tous cas) sont cultivés non taillés,
et ombrés sous des tonnelles. Mais l'ombrage du tencha est plus long
(25 jours en moyenne contre 20 pour le gyokuro), la cueillette est
faite de manière un peu différente, et surtout, le séchage est
complètement différent, le tencha n'étant pas malaxé.
Je
présente donc cette année trois matcha de M. Tsuji, trois cultivars
différents. Trois gammes différentes aussi, même si tous les trois
sont hauts de gamme.
D'abord,
un matcha cultivar Asahi qui provient du haut du panier de ce
producteur, du tencha qu'il a présenté au concours national cette
année, arrivant dans le peloton de tête.
Cet
Asahi est cultivé avec l'ombrage traditionnel appelé ''honzu'',
c'est dire couvert d'abord avec des stores de paille puis avec de la
paille posée au dessus. Cette méthode traditionnelle est
aujourd'hui très rare, pour le matcha et plus encore pour le
gyokuro, la main d’œuvre et le cout nécessaire étant très
important. (l'ombrage traditionnel de Yame dont on se vante beaucoup
à Fukuoka est en réalité une technique plus simple qui utilise
seulement des stores de paille, donc bien plus simple à mettre en
œuvre). Seuls les plantations destinées aux tencha les plus hauts
de gamme (concours, etc) sont encore couvertes de cette façon. C'est
néanmoins une technique traditionnelle japonaise qui tend à disparaitre et qu'il faut conserver.
Parfum
très puissant, pâtissier et frais, stimulant.
En
versant l'eau chaude, on trouve un incroyable parfum de crème aux
œufs. On y trouve aussi en fond quelque chose de boisé.
Le
thé est fort, mais très doux, une douceur qui est vraiment plus
proche du sucré que du simple umami. Cela n'est pas seulement une
impression en after, mais quelque chose que l'on ressent vraiment en
bouche de manière direct sur la langue, les joues. Le crémeux,
l’onctuosité de ce matcha est formidable. Ce n'est que du thé et
de l'eau, pourtant c'est un vrai dessert, et à ce niveau là les «
matcha latte » à la mode faits de faux matcha, de lait et
bourrés de sucre peuvent aller se rhabiller.
Avec un tel thé, pour les amateurs, un koicha s'impose. Moi, le koicha j'en ferais pas mon quotidien, mais de temps en temps, et puis là, vaut mieux faire tourner entre amis...
Avec un tel thé, pour les amateurs, un koicha s'impose. Moi, le koicha j'en ferais pas mon quotidien, mais de temps en temps, et puis là, vaut mieux faire tourner entre amis...
Bien
que très haut de gamme, convenant très bien pour du koicha, ce Samidori est couvert sous des fibres synthétiques (attention, cette
méthode reste un très gros travail à mettre en œuvre, demandant
bien plus d'efforts que l'ombrage direct des kabuse-cha et de
certains sencha).
Samidori propose un parfum sucré et acidulé, presque citronné, mais avec aussi ces arômes de chocolat chaud que l'on retrouve dans les bons matcha. En bouche, on a d'abord quelque de vert, un peu incisif, surtout quand le matcha est encore très chaud, duquel il se dégage de suite, naturellement un after très doux. En tiédissant, ce thé donne beaucoup de saveurs crémeuses et veloutées, mais aussi des arômes sucrés de confiserie qui rappellent un peu des fruits rouges. Ce sont ces saveurs qui se place durablement en bouche dans la longueur. Pas d'astringence ni d'amertume bien sûr.
Samidori propose un parfum sucré et acidulé, presque citronné, mais avec aussi ces arômes de chocolat chaud que l'on retrouve dans les bons matcha. En bouche, on a d'abord quelque de vert, un peu incisif, surtout quand le matcha est encore très chaud, duquel il se dégage de suite, naturellement un after très doux. En tiédissant, ce thé donne beaucoup de saveurs crémeuses et veloutées, mais aussi des arômes sucrés de confiserie qui rappellent un peu des fruits rouges. Ce sont ces saveurs qui se place durablement en bouche dans la longueur. Pas d'astringence ni d'amertume bien sûr.
J'ai
gardé pour la fin le moins cher des trois, fait de 90% de Yabukitaplus 10% de Samidori (plus pour la couleur que pour l'effet gustatif,
minime, surtout face à un cultivar aussi présent que Yabukita).
Yabukita est le plus répandu des cultivars japonais, c'est plutôt
un cultivar pour thés non ou peu ombrés, mais c'est aussi plus
globalement un cultivar d'une grande qualité. Néanmoins, pour le
matcha haut de gamme, on préfère les cultivars à thés ombrés
évidemment. Pour dire vrai, j'avais quelques doutes quand Tsuji-san
m'a donné cet été une boite de ce thé (le projet d'origine
portait que sur du très haut de gamme seulement, donc Samidori et son
Asahi niveau concours), il me semblait bien cher pour un matcha fait
avec du Yabukita. Pourtant, j'ai pu constater qu'on avait là du très
bon.
Riche
parfum vert et doux de thé ombré. Nous ne rentrons pas dans le
domaine du dessert comme avec les deux autres, mais c'est en même
temps un parfum franc, familier, presque rassurant.
En
bouche ce matcha est néanmoins déjà suffisamment velouté, avec
une bonne attaque, puissante mais sans agressivité, une très
agréable douceur mise en relief par une pinte légère
d'astringence. L'after donne dans cette bonne douceur à la fois
sucrée et végétales des thés ombrés. Cet after est fort, et il
dure très longtemps en bouche, grâce peut être à une petite
touche tannique, grâce aussi peut être à la qualité globale de
Yabukita. En effet, c'est peut être ce qui surprend le plus avec ce
matcha, c'est d'obtenir avec Yabukita, un matcha d'une telle qualité.
J'ai
faits moudre le premier lot de ces trois tencha fin aout, ce qui fait
que leur maturation, Asahi et surtout Samidori était encore peu
avancée, donnant des matcha encore relativement léger, et chaque
lot a cour de l'année, avec une maturation du tencha plus avancée,
donnera un matcha plus fort, à l'umami plus prononcé, et moins
vert. De même que le comparatif entre les différents cultivars issu
d'un même terroir est très interessant, voir changé un ''même''
matcha en fonction de la maturation du tencha est aussi très
excitant.
Pour
finir je voudrais (re)dire que le matcha est probablement l'un des
thés les plus simples à préparer, et qu'il est très dommage que
son image soit tant associée à celle de la très rigide et si
éloignée du monde du thé de la cérémonie du thé. Un bon matcha
à la maison ''sur le pouce'', simplement, juste pour le plaisir de
ces saveurs, c'est juste le pied !
Le matcha c'est cela, et non pas tous les produits, boissons ou pâtisseries aromatisées au soi-disant ''matcha'' qui n'est en fait que de la poudre de thés ombrés directement, récoltés mécaniquement (donc théiers taillés) lors de 2ème voire 3ème récoltes.
Merci Florent pour cet article dont j'avais loupé la parution, c'est comme toujours très intéressant. Et tu as tout à fait raison, boire du matcha c'est très facile, c'est délicieux, et on peut faire ça n'importe où ! Buvez du matcha ! =^.^=
RépondreSupprimerMerci pour cet article et la vidéo qui l'illustre. Peut-être avez vous déjà répondu à cette question dans un autre article, mais auriez-vous des détails sur l'origine de la technique d'ombrage des théiers ?
RépondreSupprimerBonjour
RépondreSupprimerIl semble que les origines de l'ombrage soient incertains. On sait que lorsque la technique du tencha/matcha est arrivée de Chine en 1191, à cette époque les théiers n'étaient ombrés. En revanche on pense que à l'époque de Sen no Rikyu (16ème siècle), l'ombrage avait été introduit.
Je vous remercie pour cet éclaircissement.
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