Shizuoka 2014, Tamakawa

Je contiue sur ma présentation des thés de Shizuoka (explications géographiques au début de cet article), avec cette fois encore des sencha de Hon.yama, mais qui proviennent de la zone appelée Tamakawa (autour de la rivière Tamakawa, confluent de la rivière Abe). Aussi, ces quatre thés sont fabriqués à l'usine coopérative de Yokosawa, par M. Tsukiji.


Tôbetto
 Cultivé à 800m d'altitude et cueilli manuellement sur des arbustes non taillés (essentiellement Yabukita), ce sencha est très différent des autres thés de Hon.yama, et même des autres productions de M. Tsukiji et de la coopérative de Yokosawa.
D’une part, la torréfaction est bien plus faible, mais cela n’est pas dû au producteur, mais les impressions, goûts et parfums ont un profil tout autre.
Il s’agit du plus haut de gamme des thés produits à la coopérative de Yokosawa, pourtant, ces feuilles magnifiques, qui n’ont pas grand chose à envier à certains temomi-cha, sont bien loin des standards des sencha de concours. Elles n’ont pas cette uniformité parfaite, mais absolument pas naturelle, de couleur. Ce constat simple en dit beaucoup sur la philosophie qui anime M. Tsukiji, fabriquer du thé sans rien faire de trop, juste tirer le meilleur de ce que leur nature / la Nature peut donner. 

Leur parfum est végétal sans être vraiment très vert. Il y a une texture sucrée légère, un fond boisé. Un peu déroutant, l’ouverture du sachet n’offre pas de déluge d’arômes de confiserie de certains autres sencha. C’est très pur et naturel.
C’est franc aussi, car cela se retrouve dans la tasse. Un parfum peu commun sans être extravagant, complexe mais sage. Pourtant, passées quelques dizaines de secondes, il s’échappe de la tasse (même vidée) et de la théière un fumé doux et sucré, subtil mais très net. 

 
Avec du très haut de gamme, on a souvent à faire avec des thés super boostés en acides aminés (théanine & co.) de véritables bouillons de douceur umami. Avec Tôbetto, la donne est différente. Si derrière cet ensemble complexe de saveurs végétales et boisées se retrouve de la douceur, une certaine astringence existe, dès même la première infusion parfois. Pourtant, en rien dérangeante, elle semble participer à un grand orchestre philharmonique de d’arômes. Très mélodieuse, cette musique est jouée à un volume impressionnant. Tôbetto est très puissant, mais sa liqueur reste velouté et glisse dans la gorge comme du satin.
Une forte, mais naturelle douceur arrive ensuite en arrière-goût, celle-ci dure longtemps dans la bouche, sans être trop présente, juste ce qu’il faut. Avec un mode d’infusion relativement classique pour ce type de thé haut de gamme (4g, 60ml, 60°C d’abord) on tient 5 excellentes infusions, avec même le luxe d’une sixième très convenable. Avec une légère variation des arômes vers quelque chose de tantôt subtilement floral, tantôt subtilement fruité, on n’observe alors aucune montée gênante d’astringence. Celle-ci reste présente, légère, comme une grande qualité de ce thé. 

  Après, je ne dirais pas néanmoins que ce sencha plaira à tout le monde. Moi-même, si je devais faire un difficile choix restrictif parmi ces thés de Tamakawa, je choisirais je pense le Yamakai. Mais je pense aussi que ne pas plaire à tout le monde est une qualité d’un très grand thé.
Une chose est sûre, pour ceux qui sauraient apprécier ce Tôbetto, celui-ci est quasiment inratable. De l’infusion aux glaçons jusqu’à la préparation à l’eau très chaude façon Gongfu-cha, le rayon est très large. A l’inverse, en obtenir un résultat parfais est peu être plus difficile ?

Yamakai

En provenance de la partie de Tamakawa appelée Terao, ce Yamakai est une merveille.
Vous trouverez ici l'article sur ce Yamakai 2014 de M. Tsukiji.

Kôshun

 
Ce Kôshun de M. Tsujiki est issu d'une récolte manuelle, sur des théiers taillés, de Terao également. Kôshun est un cultivar connu pour son parfum floral particulier. Certains connaissent peut être les Kôshun de Fuji de M. Akiyama que je propose chaque année, et bien celui de M. Tsukiji est fort diffèrent. Disons que le producteur de Fuji met beaucoup de soin à faire ressortir au maximum les particularités de ses cultivars. Notre producteur de Tamakawa recherche plutôt la conception d'un très bon thé, comme je l'ai déjà dit « sans en faire de trop », en prenant en compte les caractéristiques de chacune de ses variétés de théiers. 
 
Ainsi, son Kôshun reste très sage. Nous avons avant tout un sencha au bon parfum frais et sucré, soutenu par une torréfaction moyenne, avec en fond des arômes finalement plus fruités que floraux.



En bouche on y ressent ni l'astringence ni l'impression tannique que peuvent parfois laisser les cultivars très parfumés. Ce sencha montre beaucoup de douceur, sans lourdeur, avec une richesse de saveurs fraîches et dynamiques. Bonne longueur et aftertaste doux qui se développe aussi bien en bouche que dans la gorge.
Une caractéristique importante, est que malgré le caractère particulier de ce cultivar, il donne un thé à la personnalité, au profil, qui reste très japonais. Je veux dire en comparaison avec des Sôfû, ou plus encore Kondô-wase, dont les racines indiennes viennent apporter des senteurs « exotiques ».
Pour la préparation, des paramètres très classiques fonctionnent à merveilles, pour un ratio feuilles/eau de 4g/70-80ml, une première infusion d'une minute à 70-80°C.
Mais ce Kôshun est une merveille préparé glacé en théière comme ceci :
  1. 4g de feuilles dans une théière (avec une ouverture large les choses seront plus simples)
  2. Verser environ 30ml d'eau à 80-90°C
  3. Puis mettre tout de suite des glaçons dans la théière (de manière à ce que la partie supérieur des glaçon sorte de l'eau
  4. Attendre un peu moins de 10 min, puis servir le thé.
La deuxième infusion peut se faire directement à l'eau froide, pour environ 10-15min.


Yokosawa

Enfin, ce sencha Yokosawa est le seul que ces quatre thés qui ne contienne pas exclusivement des feuilles cultivées par M. Tsujiki, mais un assemblage de feuilles de ce producteur et d'autres producteurs de Yokosawa, le tout fabriqué par M. Tsukiji à la coopérative de Yokosawa. Le cultivar est le poids lourd Yabukita. 

 
Même s'il s'agit du moins haut de gamme des thés de Yokosawa, le travaille des feuilles fait déjà amplement honneur au travail du maître. Leur doux parfum ce compose des arômes de tourbe sucrée et d'herbes aromatiques que l'on retrouve dans d'autres thés de la région, mais aussi des arômes sucrés vanillés plus habituels et classiques. 

 
Le profil un peu boisé et minéral des saveurs de la liqueur viennent apporter force et personnalité à sa douceur plus classique, très « Yabukita ». Ronde, mais avec du corps, cette liqueur est stimulante, et on y trouve un léger fond astringent, dont la force peu varier beaucoup selon la méthode d'infusion.
Il me semble qu'il est préférable de le préparer avec de l'eau suffisamment tiédie, aux alentours de 65°C, et d'augmenter le temps d'infusion (1min10-20), plutôt que l'inverse.
Là encore beaucoup de force. Les saveurs douces persistent en bouche, parfument la gorge, sans rien de râpeux. L'astringence augmente un peu au fil des infusion, mais sans dépôt tannique. Le tout reste très fluide, et devient plus rafraîchissant encore alors que les parfums se font plus verts.

En tant que Yabukita de Hon.yama, ce thé peu être aussi intéressant à boire en parallèle avec ceux de Ushizuma (M. Shigeta) et de Ôkawa-Ôma (M. Nakamura).



Commentaires

Articles les plus consultés